Le 20 octobre 2023, une manifestation de soutien à la Palestine était organisée devant la préfecture de Bourg-en-Bresse. La veille, la Préfecture de l’Ain publiait un arrêté d’interdiction qui, en plus de constituer une offensive anti-démocratique, ne laissait aux organisateurs ni le temps de contester l’interdiction, ni même de prévenir largement les participants à la manifestation.
C’est dans ce contexte que Candice, maraîchère à Cize et militante au sein de l’association France Palestine qui pensait pouvoir se rendre à la manifestation a été interpellée et a reçu une amende de 135 € qu’elle contestait ce vendredi devant le tribunal de police. Elle explique :
« Je tenais à contester cette contravention parce que je trouvais ça injuste d’avoir été amendée pour avoir participé à une manifestation, c’est une atteinte à la liberté d’expression.
Certes, la manifestation était interdite, mais cet arrêté d’interdiction était aussi très injuste. J’étais en colère de savoir qu’on ne pouvait pas faire une manifestation pacifiste pour la paix. On est conscient du contexte en Palestine, je suis extrêmement touchée par ce qui se passe là-bas. »
L’interdiction décrétée par la Préfecture de l’Ain et le recours massif aux amendes de police font partie de l’arsenal répressif massivement utilisé par le gouvernement français depuis le 7 octobre 2023. Il faut en effet rappeler que le soutien de l’Etat français au « droit d’Israël à se défendre » s’est notamment traduit par l’envoi d’un télégramme par Gérald Darmanin le 12 octobre 2023 aux préfets, ordonnant l’interdiction des manifestations pro-palestiniennes.
Cette directive avait conduit à des interdictions systématiques des manifestations et à un véritable tandem répressif entre l’administration et la police : alors que les manifestations étaient interdites, souvent à la dernière minute et sans possibilité de contestation, la police déployait des moyens importants pour verbaliser massivement les participants et les dissuader de revenir manifester.
C’est ainsi que lors d’une manifestation parisienne du mois d’octobre 2023, la préfecture de police revendiquait plus de 1300 verbalisations.
Face à cette méthode d’isolement et de répression financière déjà éprouvée durant les mobilisations des gilets jaunes, dans les quartiers populaires et lors des mobilisations contre la réforme des retraites, le Collectif d’action judiciaire avait dénoncé cette pratique et publié un kit d’auto-défense afin de contester les amendes.
Outre l’aide juridique sur la procédure de contestation, la politique du Collectif d’action judiciaire a été de constituer des groupes d’entraide et de solidarité entre plusieurs centaines de personnes ayant subi des verbalisations.
C’est grâce à ce cadre d’organisation que Candice explique avoir finalement contesté sa contravention : « Une association m’a indiqué qu’un cadre avait été mis en place par le Collectif d’Action Judiciaire pour contester les contraventions, avec un kit pour contester correctement et une boucle de message pour communiquer avec les autres personnes concernées par les amendes.
Au début, quand on ne sait pas comment faire on ose pas contester, on se dit qu’on peut vite faire une erreur. Le fait que des juristes aient élaboré ce kit m’a motivé à le faire. En plus, j’intégrais la boucle de messages avec les gens qui subissaient la même situation, ça permet de sortir de l’isolement et de rejoindre un collectif, c’est ça qui donne de la force ! . »
A ce titre, la décision obtenue par Candice devant le tribunal de police de Bourg-en-Bresse constitue une première victoire importante face à une répression qui persiste largement comme en témoignent les interdictions récentes du rassemblement de soutien à la libération de Georges Abdallah et de la manifestation féministe radicale du 7 mars dernier.
Pour Candice qui s’estime à la fois « graciée et condamnée », c’est une victoire en demi-teinte, mais cette dernière rappelle l’importance fondamentale de contester ses contraventions : « Le tribunal m’a reconnu coupable des faits reprochés mais m’a dispensé de payer l’amende. Pour moi ce n’était pas une question financière, j’ai les moyens de payer 135 euros. Mais l’acte de réprimander la liberté d’expression m’a mis en colère, je trouve ça super injuste. Que ce soit 10 ou 1500 euros, ce n’est pas la question.
Et d’ailleurs je trouve que celles et ceux qui peuvent le faire doivent le faire. Il faut contester par solidarité pour toutes celles et ceux qui ne l’ont pas fait, qui sont seuls, qui n’ont pas les moyens de payer cette somme. Il faut que le maximum de personnes sache que c’est possible ! »
Face à la répression et la criminalisation persistante de toute expression de soutien envers le peuple Palestinien, il est urgent de s’organiser et de faire front face à ces attaques !