La mosquée Bilal, à Meaux, est fermée depuis juin 2021, suite à l’effondrement de son toit. Le Collectif musulman de Meaux dévoile son projet de reconstruction.

La mosquée inaccessible depuis l’orage de 2021
Depuis le mois de juin 2021, la mosquée est fermée au public. À la place, des structures préfabriquées reçoivent un petit nombre de fidèles pour les prières et le bureau du CMM. Le samedi 19 juin 2021, un violent orage s’abat sur Meaux. Des rues sont inondées comme rarement, et, à Beauval, le toit de la mosquée Bilal s’effondre.
Heureusement, personne n’était présent à l’intérieur. « Le toit n’a pas supporté les fortes intempéries. Le sous-sol était déjà inondé, l’évacuation de l’eau n’était plus active » se souvient Karim Hadj, secrétaire du CMM. « Ça a été psychologiquement dur pour nous. Si elle était ouverte depuis 2016, on venait seulement de faire l’inauguration un mois plus tôt. Ça a été un choc. »
L’assurance est rapidement venue mais, après plusieurs mois, le résultat de l’expertise tombe : l’assurance ne couvre que les frais dus à l’inondation du sous-sol. « Pour l’expert, l’effondrement du toit n’avait pas de lien avec l’inondation. » Des contre-expertises sont demandées et donnent cette fois raison au CMM.

Depuis quatre ans, rien n’a changé dans la salle de prière des hommes de la mosquée. La toiture est toujours affaissée, avec un immense trou laissant passer les rayons du soleil. « Nos avocats vont bientôt se réunir pour obtenir un arrangement à l’amiable avec l’assurance. »
Une mosquée dans « les codes de l’architecture islamique »
En janvier 2022, le CMM se ressaisit et réfléchit à l’avenir de sa mosquée. Si des travaux doivent être réalisés, pourquoi ne pas créer un lieu de culte avec une identité claire, conçu avec les codes de l’architecture islamique. « On a appris que les fondations étaient touchées. Dans tous les cas, il fallait tout raser », poursuit Karim Hadj.
Le projet mûrit, et les visuels commencent à se dessiner. « C’était important de montrer cette identité, il y a une grande communauté à Meaux. »
Fini le hangar récupéré et aménagé en mosquée en 2016, pour laisser place à un véritable lieu de culte identifiable de tous, « harmonieux avec le paysage urbain » indique le CMM. « On a revu la mosquée pour qu’elle soit adaptée à nos besoins, personnalisée, et correctement orientée. »
Le CMM contacte plusieurs architectes, et un projet, celui de Novarchi, cabinet de Champs-sur-Marne, retient son attention. « Nous nous sommes rapprochés de la mairie qui nous a apporté son soutien. L’agglomération a un projet important de réaménagement du quartier (pôle Georges Claude, N.D.L.R.), c’était important de communiquer dessus. »
Accueillir un nombre de musulmans toujours plus important
D’extérieur, la mosquée sera donc reconnaissable avec des grandes arches et des calligraphies typiques islamiques. À l’intérieur, le lieu de culte sera sur trois niveaux : un rez-de-chaussée et deux étages.
Au rez-de-chaussée, il y aura bien évidemment un espace cultuel avec une salle de prière pour les hommes, installée sous une grande verrière pour apporter un maximum de luminosité. « L’espace de prière doit absorber nos besoins. Le nombre de fidèles est en nette augmentation. Avant la destruction, les vendredis et pendant le Ramadan, on avait jusqu’à 2 000 personnes présentes aux prières. » À ce premier niveau, il y aura également une salle d’ablution, pour que les musulmans se purifient avant la prière.
Au premier étage se trouvera la salle de prière des femmes aménagée en mezzanine, une autre salle d’ablution, ou encore des salles de réunion.
Enfin, le dernier niveau sera consacré aux activités extrascolaires comme l’apprentissage de la langue arabe. « On agrandit le bâtiment complet mais pas forcément l’espace de prière » présent Karim Hadj. Hommes et femmes confondus, la nouvelle mosquée Bilal pourrait accueillir en simultanée 1 716 personnes, 1 932 en prière dite « étendue » pendant les grandes journées comme le vendredi.
Un terrain plus grand avec différentes entrées
L’entrée principale, pour les hommes, se fera du côté du boulevard du Chevalier Bayard. Mais d’autres entrées seront aménagées pour fluidifier la circulation des fidèles dans le bâtiment. Les femmes, qui ne prient pas au même endroit que les hommes, auront leur propre entrée à l’arrière de la mosquée, du côté de l’avenue Jean Bouvin.
Il y aura un cheminement piéton avec des espaces verts, la végétalisation, c’est très important pour nous !

Vendredi 4 avril 2025, la mairie de Meaux a d’ailleurs voté la cession d’une parcelle de 300 m2. Grâce à cet espace, la mosquée pourra être construite quelques mètres plus loin, afin de créer un parvis d’assurer la sécurité des fidèles, qui seront donc plus éloignés du boulevard.
« On sait que ça peut être mal vu »
Élément rare aujourd’hui : la mosquée sera également composée d’un minaret sur l’extrême droite du bâtiment. Une grande tour de plus de 17 mètres qui doit surplomber les autres bâtiments de l’édifice. Traditionnellement, le minaret permet d’appeler les fidèles à la prière, cinq fois par jour, avec une alerte sonore.
Voulant réaliser une mosquée écologique, le CMM souhaite que le minaret puisse récupérer les eaux de pluie. « On sait que ça peut être mal vu, comme les coupoles, qui sont des éléments typiques de l’architecture islamique. » Pour limiter la gêne aux personnes du quartier, le CMM réfléchit à faire un appel à la prière lumineux avec une petite lumière LED.
Karim Hadj le sait, ce projet peut faire réagir même si, pour l’heure, aucun retour n’a été reçu en dehors de la communauté musulmane. « On comprendrait qu’il y ait des craintes par rapport à la visibilité, c’est légitime. On ne veut froisser personne et on travaille avec la mairie sur un projet interreligieux. Nous sommes musulmans, mais aussi Meldois. Il faut casser les barrières ! On envisage même de faire une journée portes ouvertes à la fin des travaux pour la population. On est là pour briser les préjugés » réagit le secrétaire du CMM, anticipant les différentes réactions des habitants de Meaux.
Un projet qui repose sur les dons
Alors, quand sera construite cette nouvelle mosquée ? Combien de temps durera le chantier ? Des questions qui restent aujourd’hui sans réponse précise. « On espère commencer à raser le bâtiment actuel au dernier trimestre 2026 », indique Karim Hadj.
Car la construction d’une mosquée, un chantier privé, peut prendre de très longues années. En effet, son financement repose en majorité sur des dons. Les fonds nécessaires affluent donc au fur et à mesure. À ce jour, le CMM aurait environ 700 000 € de trésorerie. Il attend encore le remboursement de l’assurance pour peut-être atteindre la barre des 2 millions d’euros nécessaires pour entamer les travaux.
« On fait aussi partie du Conseil Départemental du Culte Musulman de la Seine-et-Marne, qui permet de mutualiser les collectes réalisées auprès des fidèles. Cela aide à financer les projets de chacun. » De son côté, le CMM continue régulièrement à faire des appels aux dons, et réfléchit déjà au moyen d’accueillir les musulmans de Beauval pendant le chantier.