Akli Mellouli critique un texte qui stigmatise les femmes musulmanes et détourne la laïcité

Le Sénat français a adopté, cette semaine, une proposition de loi interdisant le port de signes religieux dans les compétitions sportives et les piscines municipales. Lors des débats, le sénateur du Val-de-Marne, Akli Mellouli, a vivement dénoncé une mesure qu’il qualifie de « xénophobe et raciste ».

Selon le texte voté par la majorité sénatoriale, « le port de tout signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique ou religieuse est interdit » lors des compétitions départementales, régionales et nationales organisées par les fédérations sportives délégataires de service public. Le gouvernement a soutenu cette initiative, affirmant qu’elle contribue à la lutte contre le séparatisme.

Prenant la parole au Sénat, Akli Mellouli a critiqué une incohérence manifeste dans l’esprit du texte. « On prétend vouloir protéger, intégrer et émanciper les jeunes femmes, mais on commence par les empêcher d’accéder aux espaces de socialisation et d’émancipation », a-t-il ironisé. Il a souligné que la loi vise principalement les femmes musulmanes, au motif qu’elles porteraient un voile ou un autre signe religieux.

Le sénateur a dénoncé le caractère dogmatique des promoteurs du texte. « Certains nous traitent d’idéologues, mais avoir une idéologie n’est pas un défaut. C’est le dogmatisme qui pose problème », a-t-il affirmé, en accusant la droite sénatoriale de ne pas voir la société telle qu’elle est réellement. Il a aussi raillé les arguments avancés pour justifier l’interdiction, évoquant les discours sur des matchs de football qui s’arrêteraient pour la prière. « Je ne sais pas où on voit ces matchs-là, où un fait divers devient une réalité nationale », a-t-il lancé.

– L’islamophobie institutionnelle en toile de fond

Cette nouvelle loi s’inscrit dans un climat plus large de tensions entre l’État français et les institutions musulmanes, illustré récemment par le blocage de l’agrandissement d’une mosquée à Nanterre. Malgré le soutien de la municipalité, le projet est entravé par la préfecture qui multiplie les recours administratifs.

Le sénateur a également mis en garde contre une évolution inquiétante des politiques publiques. « Bientôt, on va prendre des lois pour condamner les délits d’être musulmans dans ce pays », a-t-il averti. Il estime que l’interdiction du voile dans le sport ne repose pas sur une volonté de laïcité, mais bien sur un rejet de la visibilité des musulmans dans l’espace public. « Si on veut aider ces jeunes femmes à s’émanciper, il faut qu’elles aient le choix et non qu’on les enferme par la contrainte », a-t-il insisté.

Mellouli accuse le gouvernement de détourner le principe de laïcité à des fins discriminatoires. « Cette loi n’a rien à voir avec la laïcité. Elle galvaude et détourne ce principe au profit d’une stigmatisation ciblée », a-t-il martelé.

– Des chiffres sous-estimés sur les actes antimusulmans

Dans ce contexte, le ministère de l’Intérieur a récemment annoncé une baisse de 29 % des actes antimusulmans en 2024, avec 173 faits recensés contre 242 en 2023. Toutefois, ces chiffres sont largement contestés par les associations de défense des droits, qui estiment qu’ils sont sous-évalués, car de nombreuses victimes ne portent pas plainte.

Face à cette tendance, Mellouli appelle à la vigilance. « On détourne la laïcité pour justifier des exclusions, mais en réalité, c’est une politique d’invisibilisation des musulmans qui est en marche », a-t-il conclu.

L’adoption de cette loi marque un nouveau chapitre dans le débat sur la place de l’Islam en France et risque de provoquer de nouvelles réactions, notamment lors de son examen à l’Assemblée nationale.

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